NF525
Sylvie Venzal

Journaliste, Sylvie Venzal a travaillé pour de grands quotidiens régionaux.

Selon Bercy, la facture de la fraude à la TVA se monterait, en France, à plusieurs milliards d’euros par an. Dès 2013, la loi Cahuzac entendait déjà lutter contre cette hémorragie.

Sans obliger les commerçants à s’équiper de caisses sécurisées, le texte prévoyait déjà des sanctions non seulement à l’encontre des fraudeurs mais aussi des éditeurs de logiciels. Visionnaires et soucieux de se prémunir de tels désagréments, ces derniers ont donc commencé à étudier la mise au point d’outils sécurisés et certifiés.

La norme NF525

L’article 88 de la loi de finances 2016, votée en décembre dernier, vient leur donner raison en introduisant de nouvelles règles.

Les restaurants, comme les autres commerces, devront, en effet, dès le 1er janvier 2018, s’équiper d’un logiciel de caisse « anti-fraude ». Sociétés spécialistes de la certification et acteurs du secteur de l’encaissement ont donc mis au point une norme, la NF525, destinée à encadrer les bonnes pratiques en la matière.

Caisse certifiée NF525Un produit conforme devra permettre la totale transparence et la traçabilité de toutes les opérations d’encaissement, leur archivage et leur conservation. Il devra, en outre, certifier l’absence de fonctions permettant d’occulter ces données et assurer les moyens de les restituer afin de simplifier les contrôles, qu’ils soient internes ou réalisés par l’administration.

Concrètement, les caisses et logiciels répondant aux critères retenus pour la NF525 préviennent toute tentative de fraude fiscale en rendant impossible notamment l’effacement des historiques de commandes ou l’annulation des ordres déjà enregistrés.

Cependant, s’équiper d’un logiciel ou d’une machine estampillée à la nouvelle norme n’a toujours aucun caractère obligatoire, un simple certificat de conformité aux contraintes légales, délivré par l’éditeur ou le fabricant, permettra aux commerçants d’être en règle.

Des investissements à prévoir sinon gare aux sanctions

On estime à 600 000 les utilisateurs de caisse enregistreuse en France.

Dans le cas d’un équipement évolutif, une simple mise à jour, parfois réalisée dans le cadre du contrat de maintenance, peut suffire à obtenir la certification. Mais certains appareils trop anciens (comme les caisses non informatisées) devront être remplacés au plus tard le 31 décembre 2017. Le budget à prévoir pour une caisse tactile certifiée est d’environ 1 500 euros/HT mais comptez 3 000 à 3 500 euros/HT pour une caisse certifiée NF525. A ce jour, quelques sociétés (comme JDC, Atoo ou encore Pi électronique) proposent déjà des dispositifs ayant obtenu l’estampille.

Si l’horizon 2018 peut encore sembler lointain, il vaut mieux être prévoyant et prendre au plus tôt toutes les dispositions pour éviter de coûteuses déconvenues. Car en cas de manquement, la sanction sera lourde : lors d’un contrôle fiscal ou simplement de vérification de votre matériel, si celui-ci n’est pas conforme ou si vous êtes dans l’incapacité de présenter un certificat, ce sera 7 500 euros d’amende assortis de l’obligation de vous mettre en règle sous 60 jours faute de quoi une nouvelle pénalité vous sera infligée. Et il faut aussi garder à l’esprit qu’en la matière, les agents du fisc peuvent intervenir de manière inopinée, plus besoin pour eux d’annoncer leur venue comme lors d’un contrôle fiscal traditionnel. Autant de raisons de se mettre en règle au plus tôt.

L’Acedise, le « repenti » et les avantages insoupçonnés

L'Acédise

L’Acedise (Association des constructeurs, éditeurs, distributeurs, installateurs de systèmes d’encaissement) s’était livrée, voici quelques années, à un étonnant calcul… Si l’on part du principe que dans le commerce de détail et la restauration :

  • 15 % des achats sont payés en espèces,
  • et que 10 à 30 % de ce cash est dissimulé et échappe à tout impôt,

on parvient à la prodigieuse somme de 4 à 11 milliards d’euros de fraude par an. Dans le difficile contexte économique actuel, il était inéluctable que le gouvernement veuille frapper un grand coup.

Xavier Denamur, propriétaire de cinq restaurants, ancien fraudeur aujourd’hui « repenti », ne dit pas autre chose. Dans son livre « Et si on se mettait enfin à table », il explique :

Face à l’ampleur de la dette, plus de 2 000 milliards d’euros, l’entreprise France n’a plus trop le choix, sauf à jeter l’éponge. Il faut aller chercher le pognon au fond de chaque tiroir-caisse… La lutte contre l’optimisation fiscale des grands groupes étant une tâche ardue, l’État a donc décidé de monter au front sur les commerces de détail.

Pot de fer contre pot de terre… Les commerçants pris dans la tourmente de la loi de finance pourront toujours se consoler en découvrant les vertus insoupçonnées de ces logiciels « mouchards » qui leur permettront aussi de prendre en temps réel leurs salariés indélicats les doigts dans le pot de confiture.